Une BD documentaire sur les jardins potagers de Montréal

Le reportage BD « Agriculture urbaine, une tomate à la fois » est le récit d’une recherche réalisée pendant quatre ans dans la région de Montréal sur les potagers individuels. (Publiée dans The Conversation en novembre 2021.)

Je ne sais pas si la BD documentaire est un style plus répandu qu’avant ou si je le remarque simplement davantage, mais je trouve l’idée très intéressante. C’est un intéressant médium de diffusion des idées.

 

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L’équipe de recherche a répertorié plus de 17,046 jardins pour une superficie totale de 47,9 hectares. Un hectare valant 10,000m2, ces jardins auraient donc en moyenne 28m2, soit l’équivalent d’une bande de 4 mètres par 7 mètres, ce qui est quand même assez grand.

Ces jardins auraient produit pour une valeur entre 25 et 50 millions de dollars en fruits et légumes, soit entre 1,400$ et 2,800$ par jardins, ce qui est beaucoup plus que ce que j’aurais estimé.

Les chercheurs estiment que “avec une production de 3kg/m2, ça veut dire qu’avec un 10m2 de potager, une famille de 4 personnes produit 28% de ses légumes frais durant l’été.”

Bon, est-ce que ça veut dire que le jardin produit 28% des besoins annuels durant la période estivale? Sûrement pas. Qu’est-ce qu’on considère l’été comme la période du 21 juin au 21 septembre? À la fin juin, ça pousse mais on ne récolte pas grand chose, certainement pas assez pour combler les besoins d’une famille.

Bon, si j’ai de la difficulté à évaluer exactement ce que ces données veulent dire, j’en comprends qu’il y a un réel potentiel de production maraîchère en ville et un réel potentiel d’auto-production.

Quand je regarde tout l’espace consacré au gazon dans une ville, je me prends à imaginer tout ce qu’on pourrait y faire pousser.

 

 

Ce qu’on trouve à l’épicerie n’est pas si varié.

Dès qu’on parle d’autonomie alimentaire au Québec, on se fait dire que si on ne devait manger que ce qu’on produit, nous mangerions toujours la même chose, des carottes et des navets, et qu’on ne pourrait pas se passer de tout ce qu’on trouve à l’épicerie.

Or l’agriculture industrielle tend à réduire la diversité et ce qu’on trouve à l’épicerie n’est pas si varié.

Un rapport publié en 2019 par l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture, mettait en garde l’humanité du risque de pénurie alimentaire dû à la diminution inquiétante de la biodiversité dans l’agriculture. On y affirme, entre autres, que bien que l’humanité cultive environ 6000 plantes pour se nourrir, seulement neuf d’entre elles représentent à elles-seules 66% de toutes les récoltes dans le monde. (En lire davantage.)

Cette liste comprend la canne à sucre, le maïs, le riz, le blé, la pomme de terre, le soya, la noix de palme (pour l’huile de palme), la betterave sucrière et le manioc.

Oui, bien sûr, on trouve des tomates à l’épicerie, mais toujours les trois ou quatre mêmes sortes. Mais jetez un coup d’œil au catalogue d’un semencier local artisanal, vous trouverez des douzaines de variétés de tomates, des rouges, des roses, des noires, des jaunes, des petites en formes de poires, des grosses de formes allongées, etc.

Ces petites tomates jaunes en forme de poires sont délicieuses. On en trouve des semences dans les catalogues de semenciers locaux, pas à l’épicerie.

Et vous y verrez aussi des choses comme de l’arroche, des épinards-fraises, des crosnes du Japon, du pourpier d’hiver, de la roquette turque, des concombres-citrons, de la livèche, etc. Toutes des choses qu’on ne voit jamais à l’épicerie.

Le pourpier d’hiver avec ses belles feuilles épaisses et croquantes, qu’on ne voit jamais à l’épicerie. Et ça pousse bien chez-nous, même au froid.

L’agriculture industrielle tend à l’uniformisation, à la standardisation et à la monoculture. Neuf plantes déjà constituent les deux tiers de la production mondiale et la diversité de la production agricole a grandement diminué au cours des dernières décennies et continue de diminuer.

Ce qu’on produit ici et qu’on peut voir dans les marchés publics et dans les paniers bio est déjà diversifié et pourrait l’être davantage.

Production en serres au Québec, au delà de bas tarifs d’électricité.

Il y a beaucoup ces temps-ci de discussions au Québec à propos du développement de la culture en serres au service de laquelle nous pourrions mettre notre formidable potentiel hydroélectrique. Or, j’ai peur parfois que notre stratégie se limite à offrir un tarif réduit aux entreprises exploitant des serres.

Il y aurait me semble-t-il la possibilité de développer des méthodes pour augmenter l’efficacité énergétique. Je sais bien qu’actuellement plusieurs entreprises travaillent à développer ce secteur et je ne suis qu’un jardinier amateur, mais je permets quand même quelques réflexions sur le sujet.

Les serres sont le plus souvent faites de verres sur tous les côtés, or le côté nord n’est jamais exposé au soleil, le côté nord est donc inutilement transparent. On pourrait penser faire du côté nord un mur massif en pierres qui accumulerait la chaleur durant la journée pour la rediffuser lentement durant la nuit.

Strawberries in chinese solar greenhouse
Strawberries in chinese solar greenhouseStrawberries in a Chinese solar greenhouse. Picture: wikipedia commons.

Pour améliorer l’isolation de la serre, on peut aussi concevoir une serre semie-enterrée. La serre pourrait être faite d’une large tranchée de peut-être deux mètres et demi de profond surplombée d’un toit de verre incliné vers le sud. La serre serait alors davantage protégée du vent et profiterait de la chaleur du sol puisque même en hiver, le sol ne gèle pas passé une profondeur de 1,5 mètres environ.

Il y a différentes expérimentations faites avec du chauffage à partir de compost. En effet, un tas de compost, ça dégage de la chaleur. Un tas de compost de 5 pieds par 5 pieds par 5 pieds dégage assez de chaleur pour le pas geler complètement en hiver et un gros de compost produit une chaleur qui peut atteindre 70 à 80 degrés au centre. On peut penser faire courir des tuyaux sous un gros tas de compost pour y faire chauffer de l’eau ou l’air qui sera ensuite amené dans la serre.

On peut aussi penser accumuler un gros tas de compost contre le mur de pierre du côté nord que je décrivais plus tôt. On aurait non seulement une isolation de ce mur mais en plus une isolation qui produit une chaleur. Et bien sûr, la production de compost est complémentaire à la production de fruits et de légumes, le compost produit va servir à engraisser la terre dans la serre.

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J’ai découvert récemment les idées d’Eliot Coleman, un maraîcher installé dans le Maine aux États-Unis, qui a développé des méthodes qui lui permettent de cultiver des légumes en plein hiver dans le climat froid du Maine.

Il expose ses idées dans son livre Des Légumes en Hiver. Ses méthodes sont basées sur le solaire passif et sur le choix des espèces à cultiver selon les saisons. Étonnamment, la plupart de ses serres ne sont même pas chauffées et quelques-unes seulement sont chauffées pour ne rester que quelques degrés au-dessus de zéro.

C’est un livre à lire pour tous ceux qui s’intéressent à la production de légumes en hiver, à l’agriculture en climat froid. C’est d’intérêt pour les producteurs professionnels mais aussi pour les amateurs. Je me dis que si M. Coleman réussit à produire des légumes en hiver sans haute technologie, il n’y a pas de raison pourquoi je ne pourrais pas étirer ma saison de jardinage jusqu’en décembre.

Je suis bien content de voir un nouvel intérêt pour la production de fruits et légumes en climat nordique. Il me semble que nous avons un beau potentiel à exploiter au-delà de bas tarifs d’électricité.

 

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Quelques références :

La ferme Four Season d’Eliot Coleman : http://fourseasonfarm.com/

Livre des Légumes en Hiver d’Eliot Coleman : https://www.leslibraires.ca/livres/des-legumes-en-hiver-eliot-coleman-9782330023584.html

La redécouverte d’anciennes méthodes de conception de serres, par LowTech Magazine : https://solar.lowtechmagazine.com/2015/12/reinventing-the-greenhouse.html

Une autre discussion : https://www.reddit.com/r/Quebec/comments/kb97bz/faire_pousser_des_l%C3%A9gumes_dans_le_nord_et_faire/

La révolution commence quelque part

Je crois n’avoir jamais participé à une manifestation, mais la révolution ne prend pas toujours la rue, la révolution peut être tranquille, elle n’en est pas moins subversive.

Aujourd’hui, des milliers de gens remettent en question le modèle agricole industriel actuel, des milliers de gens s’alarment du recul de la biodiversité. Mais par où commencer? Et que faire et comment faire?

Moi, je plante un jardin, pour produire quelque chose de bio, de local, sans sur-emballage de plastique, pour agir plutôt que subir, pour être plus autonome, pour être moins dépendant, pour proposer une alternative.

Et bien sûr, ce n’est qu’une goutte dans l’océan.

Mais la révolution commence quelque part.